Vols de métaux et autres objets dans une déchetterie

Dans cette affaire une adjointe technique territoriale employée dans une déchetterie où elle exerçait ses fonctions avait été révoquée, suspectée d’avoir volé à plusieurs reprises des matériels déposés par les usagers dans les pôles de recyclage, au détriment de la déchetterie, et de complicité de vols en laissant plusieurs personnes voler les objets déposés par les usagers. De plus, cette fonctionnaire était accusée d’avoir, à plusieurs reprises, bafoué les consignes de sécurité délivrées par son employeur, ne respectant pas le règlement intérieur des pôles de recyclage.

La fonctionnaire contestait sa révocation, aux motifs que les preuves recueillies par son employeur l’avaient été de façon déloyale par le recours à enquêteur privé.

La Cour administrative d’appel de Bordeaux, en son jugement du 19 octobre 2022 en a statué autrement, relevant que le recours à un détective privé était justifié compte tenu des soupçons portant sur l’implication de certains agents à un trafics de métaux, d’appareils électroménagers et de batteries, d’autant qu’une enquête de gendarmerie n’avait pas permis de mettre ce trafic à jour.

La Cour d’Appel de Bordeaux précise que les investigations du détective privé, réalisées sur place, sur une courte période de 6 jours et pendant les horaires de travail, dans des lieux ouverts au public, n’avait nullement porté atteinte au droit à la vie privée de l’agent sanctionné.

La Cour Administrative d’Appel de Bordeaux entérine la sanction de révocation, infligée par la Déchetterie concernée, à l’adjointe technique territoriale.

CAA de BORDEAUX, 6ème chambre, 19/10/2022, 20BX00450

Dans cette affaire, l’autorité judiciaire confirme le droit aux collectivités territoriales et organismes publics d’avoir recours à tout moyen de preuve, et de pouvoir engager un détective privé, pour défendre leurs intérêts, dans le respect de la loyauté envers leurs agents.

Toutefois, ces enquêtes doivent porter uniquement sur la vie professionnelle de l’agent et dans un lieu ouvert au public.

LA PREUVE OBTENUE DE MANIERE DELOYALE EST ADMISE, DANS UN LITIGE CIVIL, SOUS CONDITIONS

22 décembre 2023 – Cour de cassation – Pourvoi n° 20-20.648

Dans cette affaire un commercial grands comptes se fait licencier pour faute grave par son employeur.
Il conteste cette sanction devant le Conseil des Prudhommes, et ensuite auprès de la Cour d’Appel d’Orléans.

Pour justifier la faute grave de son salarié, l’employeur verse au dossier, comme preuve aux débats, l’enregistrement sonore d’un entretien, au cours duquel le salarié tenait des propos motivant son licenciement. L’enregistrement avait été effectué à l’insu de son salarié.
La Cour d’Appel jugeant que l’enregistrement avait été obtenu de façon déloyale, déclina la preuve comme irrecevable.
L’employeur s’étant pourvu en Cassation posait la question sur l’irrecevabilité de la preuve obtenu par l’enregistrement d’une conversation de son salarié, à son insu.

La Cour de cassation censure alors, l’arrêt de la Cour d’appel concernant l’irrecevabilité des éléments de preuves fournis aux débats. 

La particularité de cette affaire, était qu’aucune autre preuve ne permettait de mettre l’employé en défaut

La Cour de cassation censure l’arrêt de la Cour d’appel concernant l’irrecevabilité des éléments de preuves fournis aux débats, se référant à l’article 9 du Code de Procédure Civile et à l’article 6 §1 de la CEDH, qui dispose que  » toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle « .

La Cour précise :  » dans un procès civil, l’illicéité ou la déloyauté dans l’obtention ou la production d’un moyen de preuve ne conduit pas nécessairement à l’écarter des débats. Le juge doit, lorsque cela lui est demandé, apprécier si une telle preuve porte une atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit à la preuve et les droits antinomiques en présence, le droit à la preuve pouvant justifier la production d’éléments portant atteinte à d’autres droits à condition que cette production soit indispensable à son exercice et que l’atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi « .

La Cour se rallie ainsi à la position de la CEDH, qui établit un contrôle de proportionnalité entre le droit à la preuve et les autres droits ou libertés fondamentaux avec lesquels il entre en conflit.

Il appartiendra ainsi au juge dans un procès civil, d’apprécier l’opportunité de ce moyen de preuve, en l’occurrence le recours à un enregistrement sonore effectué à l’insu de la personne concernée par la procédure.